“Le mâle gaze” ou quel regard porté sur les films ?


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Meurs un autre jour (James Bond de Lee Tamahori, 2002).

Pierce Brosnan regarde vers l’horizon au travers de ses jumelles. C’est alors que surgit de l’eau l’actrice Halle Berry portant un bikini. Passant les mains dans les cheveux, et marchant avec une démarche féline, la tension transparaît à l’écran. La caméra remplace les yeux de James Bond et expose une ipersonnagemage fantasmée du féminin. Cette perspective est le « male gaze », c’est-à-dire une représentation de la femme comme objet de fantasme.

Or, ce type de scène se retrouve beaucoup dans les films hollywoodiens où la caméra s’attarde sur les courbes féminines. C’est parfois la première approche avec le personnage féminin. Le premier contact du spectateur avec l’antagoniste est son corps et non pas son caractère. La femme, comme corps sexualisé, est donc véhiculée par l’industrie cinématographique. Au point, que de nombreuses actrices n’arrivent pas à se défaire de l’image sexualisée qui leur est assignée.

Selon Laura Mulvey, le « male gaze » reprend le concept de regard masculin : celui du réalisateur, celui des personnages masculins et surtout celui des spectateurs. Pour elle, cette image du sexe féminin sexualisée au cinéma véhicule une vision patriarcale du sexe faible. Cette représentation est reprise à travers les publicités. Nous ne nous en rendons plus compte, mais nous sommes entourés de diverses publicités mettant en scène un corps féminin. Combien de pubs de parfum ou bien même de glaces représentent des femmes sexualisées pour un objet sans aucun rapport ? Pour Laura Mulvey, cette approche est proche du voyeurisme et vient juste satisfaire les fantasmes masculins. Les spectatrices doivent accepter ce point de vue, et inconsciemment intégrer cette image de la femme sexualisée, ce qui est fortement dangereux notamment pour les jeunes qui sont en pleine élaboration de leur personnalité.

Il est vrai que dans certains films, ce regard apporte à l’intrigue, il permettrait de comprendre les intentions du personnage. Mais, ce regard masculin est devenu très récurrent et très commun, au point qu’il est reproduit dans la vie courante par certains hommes qui se permettent de regarder avec fantasme et convoitise une femme dans la rue. Bien-sûr, il existe également des publicités et des scènes de films où c’est le corps de l’homme qui est sexualisé. Là, aussi l’homme doit répondre à certains diktats imposés au nom d’une soi-disant virilité avec des muscles ultradéveloppés ou une mâchoire carrée…  Il faut avoir conscience que les industries se servent des corps pour vendre et pour imposer leur vision de l’Homme parfait.

Cependant, ici, je tiens à me concentrer sur le male gaze qui a un impact négatif sur les femmes qui sont considérées, dans la vraie vie, par certains hommes comme un objet de convoitise. Ce phénomène ne fait qu’accentuer les pressions exercées sur les femmes et les mettre en danger face à des hommes peu éduqués et nourris de représentations erronées. Alors, pour lutter contre cette vision faussée, un nouveau regard peut être porté sur le personnage féminin : le female gaze. Il s’agit de considérer le personnage féminin non pas comme un objet, mais comme un élément principal du film, un véritable protagoniste et non plus un objet de fantasme. C’est un nouveau point de vue porté sur la femme par des femmes, avec notamment de l’empathie. Le corps féminin, l’expérience de la sexualité féminine ou bien encore les échanges se font au travers d’un nouveau point de vue, d’un regard féminin. Le but est de présenter une alternative aux points de vue habituels de certains réalisateurs dans les films, afin de montrer la complexité de l’humanité sans objectivation.

Alors, maintenant quand vous regarderez un film, prenez le temps de vous poser et de vous questionner sur les véritables intentions de la caméra, sur le véritable regard. Est-ce vraiment utile à l’intrigue ? Il est vrai que lorsque nous regardons un film, nous voulons la plupart du temps poser nos neurones, mais il reste primordial d’éduquer nos enfants mais aussi de nous éduquer à garder un esprit critique face à ce qui nous est proposé.

Marine Jouin

 

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