Du rôle des Jeux Vidéo dans l’éducation
« L'éducation n'a pas vraiment changé depuis 5 siècles. [...] Tout le reste autour de nous a changé. Des soins médicaux aux moyens de transports, tout est différent ! Mais l'éducation n'a pas changé. » — Anant Agarwal
La crise du Coronavirus a mis en évidence la révolution éducative que nous commençons à connaître. Entre cours à distance, nouveaux formats d’évaluation, nouveaux supports d’apprentissage, la vie des élèves change drastiquement, et de plus en plus rapidement. Ce sujet est extrêmement large : c’est pourquoi nous ne nous concentrons aujourd’hui uniquement sur un aspect nouveau de l’éducation, et pourtant au potentiel immense : le Jeu Vidéo.
Apprendre est le socle du jeu vidéo, si l’on sait s’en servir sans en avoir peur
Ce média, jeune et décrié à cause de l’ignorance, est pourtant une véritable mine d’idées, d’imagination, une machine à rêves et à réflexion, qu’il serait honteux de laisser de côté du simple fait de la peur, de la crainte et de quelques brebis galeuses.
L’ampleur qu’a pris le jeu vidéo est impressionnante : à l’image de la littérature, les genres qui composent ce média sont très nombreux, les idées et mécaniques également. Le jeu vidéo, oserai-je dire, se trouve même, d’un certain côté, être supérieur aux autres formes artistiques car il est le seul à inclure obligatoirement son spectateur dans son fonctionnement. Sans le joueur, rien ne se passe, rien ne se dit. Nous devenons ainsi, le temps du jeu, l’acteur, et non plus le spectateur, le lecteur. C’est le rêve de nombreux écrivains que d’inclure forcément son lecteur dans l’avancée de son œuvre, un rêve toujours lointain et encore inaccessible (si l’on exclut les Livres dont vous êtes le héros).
Ainsi, le Jeu vidéo se retrouve être un Art à part entière, quoi qu’en dise ses détracteurs, même si, obligatoirement, une frange de cet Art n’en est pas, tout comme les romans de gare et autre littérature commerciale ne sont pas égaux à la Littérature artistique, et que nous n’oserions pas confondre. Mais cela est un autre débat.
Notre sujet se trouve donc être la place du Jeu vidéo dans l’éducation. Commençons par les différents types d’apprentissage qu’il apporte.
Il y a tout d’abord apprentissage cognitif :il stimule la mémoire et l’attention, la représentation géométrique dans l’espace, la mise en place de stratégies de résolution de problèmes adaptée.
Mais aussi l’apprentissage neurologique : coordination main-œil, dextérité, réflexes.
Et enfin sociaux lorsque le jeu est communautaire.
En effet, donc, le jeu vidéo peut nous apporter une large gamme de compétences et de réflexes, que l’on retrouve aussi à travers d’autres moyens d’éducation plus conventionnels.
Ainsi, nous avons pu vous montrer que le jeu vidéo peut avoir sa place dans l’éducation, et ce à tout âge. Nous allons désormais mettre en avant certains jeux vidéo, parmi les plus représentatifs de ces qualités.
Des exemples parlants, un guide de ce qui vous sera le plus utile
Commençons par un monument du genre, cependant trop méconnu : Europa Universalis IV, par le studio suédois Paradox. Dans ce jeu de stratégie à l’échelle mondiale, le joueur incarne un pays historique, en 1444, et doit le faire prospérer par tous les moyens dont il dispose (diplomatie, économie, commerce et guerre) jusqu’en 1836. Ce jeu, durant toutes ces années, nous plonge dans le Monde de la fin du Moyen-âge jusqu’au début de l’ère industrielle, grâce, entre autre, à plusieurs milliers d’évènements, des boites de dialogues en général à choix, qui nous informent sur ce qu’il s’est historiquement passé, nous y faisant ainsi y prendre part. Connaissez-vous le Partage de la Bourgogne de 1477 ? Le fonctionnement, voire l’existence du Saint-Empire Romain Germanique ? La Prise de Constantinople en 1453 ? Le Sengoku-Jidaï japonais ? Un joueur d’Europa Universalis IV les connaît sur le bout des doigts, leurs causes, déroulement, conséquences, il en rit facilement. Il connaît également par cœur la géographie du monde, les États présents, leurs fonctionnements, leur histoire. Peu de médias peuvent égaler une telle masse d’information à travers un unique objet.
Ainsi, ce jeu ne doit pas être la seule source d’information du joueur, mais il pose suffisamment d’interrogations pour qu’il veuille en apprendre davantage. Il côtoie les événements historiques plus aisément qu’à travers un travail universitaire, et les assimile d’autant plus rapidement.
En matière d’éducation historique, nous faisons difficilement mieux. Nous pouvons cependant noter l’existence d’autres jeux du même genre, par le même développeur, avec une utilité semblable : la série des Crusader Kings, qui nous fait jouer une dynastie médiévale d’Europe, du Moyen Orient ou d’Asie, de Charlemagne à la Guerre de Cents Ans, en passant par la Peste Noire et la Horde Mongole. Ou encore Victoria II, qui nous entraîne du couronnement de Victoria à la Veille de la Seconde Guerre Mondiale, nous faisant vivre la Révolution Industrielle et les changements immenses qu’elle a entraînés.
Autre genre, autre type d’intérêt : Portal 2, par le studio Valve. Nous jouons un personnage servant de sujets de test dans une entreprise dirigée par un robot cynique et efficace. Nous devons à travers ce jeu résoudre des centaines d’énigmes d’un genre unique : nous pouvons créer des couples de portail : en en traversant un, nous arrivons à l’autre, peu importe la distance. Tout le jeu est construit sur ce principe, et la réalisation est si bonne et intuitive qu’il est entré dans les légendes du jeu vidéo. Ne croyez pourtant pas qu’il est aisé de s’en sortir. La difficulté sait nous mettre des bâtons dans les roues. Ce jeu nous pousse ainsi à l’observation, à la prévoyance, à la planification d’une suite d’action.
Dans un genre plus commun, nous avons les jeux qui nous font incarner un héros devant traverser de nombreux problèmes jusqu’à la fin du récit. Nous citerons ici Red Dead Redemption 2, par Rockstar Studio. Nous incarnons ici un bandit de grand chemin, dans les États-Unis de 1899. L’intérêt principal n’est pas ici l’histoire, bien qu’elle soit très bien menée, mais plutôt le zèle avec lequel les développeurs ont rendu fidèlement le monde, dans ses moindres détails, dans son ambiance, dans son écriture. En jouant à ce jeu, vous irez en Louisiane, et vous y ressentirez l’atmosphère particulière, l’accent local, les gens parlant français, l’architecture typique. Vous irez également dans l’équivalent de la Californie et de son désert, avec ses spécificités, son histoire, ses bâtiments de western, ses coutumes, la vie qui y est menée. Chaque passage, chaque voyage, chaque rencontre apporte son lot d’informations sur ce monde, sur cette époque particulière.
Il existe aussi les deux « Discovery Tour « des jeux Assassin’s Creed Odyssey et Origin : ce sont des modes de jeux réservés à la découverte respectivement de la Grèce et de l’Égypte antique, sans ennemis, sans histoire, des musées à ciel ouvert remplis d’information précises et ludiques.
Dernier exemple, pour l’aspect communautaire du jeu vidéo, nous pouvons penser à la série des We Were Here, des jeux d’énigmes qui ne se lancent qu’à deux, et dans lequel chaque problème ne peut être résolu que par la communication, l’explication et la coordination entre les joueurs. Et deux cerveaux ne sont pas de trop !
Nous conclurons sur une simple idée : n’ayez pas peur des jeux vidéos et de leur image dans les grands médias. Car le jeu vidéo est similaire à une voiture : sans une éducation préalable, le conducteur est un danger pour lui-même et les autres au volant de sa voiture. Il en va de même pour le jeu vidéo : sans une éducation préalable, et surtout s’il est laissé à lui-même, le joueur ne tirera rien de bon du jeu vidéo, pouvant se mettre en danger, par manque de savoir. Alors, ne laissez pas votre enfant, votre ami seul face au jeu vidéo, aidez le en le comprenant et en l’accompagnant, en jouant avec lui. Vous en tirerez forcément quelque chose, vous aussi.
Nicolas Graingeot