Introduction à la peinture néerlandaise


Rembrandt, La Ronde de Nuit (1642)


Les Provinces-Unies (ancien nom des actuels Pays-Bas) connaissent au XVIIe siècle leur âge d’or. Elles parviennent à défendre leur indépendance au milieu des grandes puissances environnantes (France, Angleterre, Espagne) tout en devenant l’épicentre du développement commercial mondial. Fort de cette infrastructure économique florissante les Provinces-Unies progressent sur tous les plans. C’est le cas en politique avec la création d’une république assurant une liberté de pensée et de religion sans nul autre pareil en Europe. On perçoit cet essor également en philosophie et en sciences. Les penseurs et savants, attirés par ce dynamisme et cette tolérance élevée en principe, viennent en nombre. Enfin, on constate en cette période prospère l’émergence d’une nouvelle école artistique s’émancipant des courants passés, l’école hollandaise. Elle se fait le reflet de ce temps si particulier où les échanges marchands croissants et un cadre politique progressiste donnent à voir une société nouvelle. C’est cette société et son environnement qui intéressent les peintres, dans tout ce qu’elle a de moderne et d’universel. 

Un art sans sujet

Comme l’évoque le peintre et critique d’art Eugène Fromentin, l’art hollandais se distingue de tout ce qui a pu le précéder au Moyen-Âge par l’absence de sujet. Par sujet on entend un passage mythologique, biblique ou littéraire. Loin de l’art italien et de ses Annonciation, Crucifixion et autres miracles christiques, l’art hollandais marque une rupture avec la métaphysique, revenant sur terre, se penchant vers les « choses » que d’aucun pourrait qualifier de « bassement matérielles ». On troque les travaux d’Hercule pour une réunion de négociants, on troque l’Assomption pour une kermesse, on troque Tristan et Iseut pour un troupeau de bovins. 

Le Taureau (1647)

Paulus Potter

La Meuse à Dordrecht (1620)

Albert Cuyp

Cette absence du sujet pourrait être interprétée comme un effet résultant de la fin du système féodal. En détournant une expression gramscienne bien connue on pourrait dire que l'ancien monde disparait et qu’un nouveau se hâte d’apparaitre. La noblesse et le clergé cèdent leur place aux marchands, savants et paysans.

Eugène Fromentin nous éclaire à ce propos:

« Le moment est venu de penser moins, de viser moins haut, de regarder de plus près, d’observer mieux et de peindre aussi bien, mais autrement. C’est la peinture de la foule, du citoyen, de l’homme de travail, du parvenu et du premier venu, entièrement faite pour lui, faite de lui. Il s’agit de devenir humble pour les choses humbles, petit pour les petites choses, subtil pour les choses subtiles, de les accueillir toutes sans omission ni dédain, d’entrer familièrement dans leur intimité, affectueusement dans leur manière d’être ; c’est affaire de sympathie, de curiosité attentive et de patience. Désormais le génie consistera à ne rien préjuger, à ne pas savoir qu’on sait, à se laisser surprendre par son modèle, à ne demander qu’à lui comment il veut qu’on le représente. Quant à embellir, jamais, à ennoblir, jamais, à châtier, jamais ; autant de mensonges ou de peine inutile. » 

Pourquoi Universel ? 

L’âge d’or des Provinces-Unies peut être assimilé à un microcosme représentant le macrocosme tant par la diversité de ses paysages (villes, forêts, marais, …) que par la diversité des classes sociales qui constituent sa population. Les artistes vont exploiter cette richesse qui se concentre sur un territoire étroit pour représenter une vaste palette d’émotions humaines. En d’autres termes, la peinture de l’âge d’or hollandais relègue au second plan les évènements historiques qui touchent le territoire des Provinces-Unies et ses grands Hommes pour se focaliser sur son territoire, ses activités économiques, sa population et sa vie quotidienne. Il en résulte un art retranscrivant avec une précision remarquable la condition humaine de son temps. 

Le Bouffon au Luth (1624)

Frans Hals

Femme écrivant une lettre et sa servante (1671)

Johannes Vermeer

 

Bibliographie:

Les Maîtres d’Autrefois, Eugène Fromentin



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