Une (très) brève histoire de la littérature américaine


 
Auteur : Roger Starnes SrLigne de crédit : Unsplash

Auteur : Roger Starnes Sr

Ligne de crédit : Unsplash


Lors de sa découverte en 1492, l'Amérique est un continent culturellement neuf aux yeux des colons. En effet, en dépit de la présence des autochtones sur ces terres, les colons n'hésitent pas à utiliser le terme de « Nouveau Monde » pour le décrire, attestant de la virginité d'un monde à créer. C'est cette même « virginité » du monde qui nous intéressera au sein de cet article, « virginité » étudiée sous l'angle de la culture, d'une culture manquante à l'identité commune de colons d'origines diverses pour fonder leur union. En effet, la culture est le socle sur lequel se fonde un pays dans la création d'une identité commune, et c'est pourquoi, si nous porterons certainement un prochain article sur la place de la peinture, nous attacherons aujourd'hui à cette étude la dimension littéraire de cette « création » du « Nouveau Monde », qui nous permettra par la même occasion de vous proposer la lecture d'une liste non exhaustive de quelques chefs-d’œuvre de la littérature américaine.

Lors de la découverte de l'Amérique, les colons s'approprient les terres à travers l'affirmation d'un droit de possession légitime de celles-ci à l'encontre de l'illettrisme supposé des natifs américains. Toutefois, la littérature américaine n'émerge pas directement, et ce car les colons étaient sans doute plus occupés à construire des maisons qu'à bâtir des œuvres littéraires. Les premiers écrits dits « américains » ne sont en rien œuvre de l'imagination, et par ailleurs n'en sont pas vraiment nécessiteux. En effet, ces premières œuvres décrivent la vie des colonies de la Nouvelle-Angleterre étant le berceau historique de la littérature américaine, les interrogations religieuses ou encore les situations sociales et les relations aux Amérindiens comme en témoigne John Smith à travers A True Relation of Such Occurrences and Accidents of Note as Happened in Virginia (1608).

Au XVIIIème siècle, la pure description des premiers colons est dépassée et rehausse la place accordée au sentiment d'appartenance à une nouvelle nation. De fait, la littérature vient servir des intérêts politiques par l'effervescence nationaliste comme en témoigne les publications de nombreux auteurs tels qu'Adams, Jefferson ou encore Franklin relativement à la Révolution Américaine. Ainsi, si le premier roman américain pourrait être considéré comme The Power of Sympathie de W.H Brown publié en 1789, c'est au XIXème siècle que se font jour les premiers romans typiquement américains.

La population grandissante du XIXème siècle élargit le cortège de lecteurs, suscitant de fait l'attrait des éditeurs. Le roman américain a par ailleurs cette particularité à cette période d'être sous la grande influence de la gente féminine. En effet, les femmes, friandes de littérature sont pour beaucoup du florilège des romans sentimentaux, écrits par des femmes et destinés à un public essentiellement féminin, avec pour thème de prédilection le récit des mésaventures de jeunes filles séduites, comme nous l'expose le roman de Susanna Rowson, Charlotte Temple (1791) que l'on rangera comme prédicateur du roman féminin. Les premières grandes œuvres de la littérature américaine naissent sur la côte Est comme en témoigne l'exemple de James Fenimore Cooper avec The Last of the Mohicans (1896) encore lu dans le monde entier. Au même moment, les mots d'Edgar Allan Poe jaillissent dans le paysage littéraire américain. De l'exploration de la psychologie humaine au dépassement des frontières de la fiction vers le mystère et le fantastique, Edgar Allan Poe s'inscrit comme un auteur de marque dans la reconnaissance de la littérature américaine par-delà ses frontières. De même, les spécialistes s'accordent pour qualifier le roman de Hawthorne The Scarlet Letter comme l'un des fondements de la littérature américaine, qui, publié en 1850 et décrivant le chemin de croix d'une jeune femme dans une colonie puritaine de la Nouvelle-Angleterre ayant été infidèle à son mari, est condamnée à porter en signe de pénitence et de déshonneur la lettre A écarlate sur sa robe. Enfin, est publié un an après le roman de Melville Moby-Dick (1851), monument de la littérature mondiale. Ces deux romans de Melville et de Hawthorne semblent prédicateurs des thèmes dominants de la littérature qui vont émerger. En effet, l'infamie, l'abjection, la culpabilité, l'expiation, mais aussi l'aventure sont des thèmes prédominants d'une littérature américaine habitée par le mal.

Le XXème siècle, succédant à l’œuvre de Marc Twain que vous connaissez tous par The Adventures of Tom Sawyer (1876), voit opérer un véritable bouleversement de la littérature américaine. En effet, c'est à travers la Renaissance de Harlem que se déploient des romans aux approches profondément sociologiques, ethniques ou politiques, comme en témoignent les œuvres de J.London et de W.Faulkner. L'œuvre de Jack London est déconcertante. Issu du prolétariat, écrivain de la révolte, profond vitaliste et pourtant fasciné par la mort, il décrit dans un roman presque autobiographique intitulé Martin Eden (1909) la profonde déception que cache toute vie. Enfin, William Faulkner s'inscrit sans doute comme l'écrivain américain du XXème siècle qui eut la plus grande autorité sur le paysage littéraire d'Amérique du Nord, faisant de la puissance de son verbe la matrice de son aura, comme le démontre avec brio The Sound and the Fury (1929).

La « Génération perdue », courant littéraire américain né de l'entre-deux-guerres, évoque la perte de transcendance d'une Amérique profondément transformée par des mutations sociales et morales, comme en font la démonstration Fitzgerald, Hemingway ou encore Steinbeck. Steinbeck est sans doute à considérer comme l'auteur de la révolte par excellence. En effet, The Grapes of Wrath (1939) est un monument de la littérature mondiale qui aura un retentissement tout particulier dans les débats sociaux et politiques des États-Unis. Enfin, Salinger, dans The Catcher in the Rye (1951), expose la désillusion d'une société n'étant que malheur et ennui, d'une Amérique dans laquelle le héros n’est autre que celui qui a oublié ses rêves, héros prenant place chez Salinger à travers le personnage de Holden Caulfield, un jeune homme des plus communs errant dans la vie tout en s'interrogeant sur le sens que celle-ci aura à l'âge adulte, âge auquel la raison sonne le glas de la désillusion, désillusion damnant l'homme à la morosité de la vie.


Yoann STIMPFLING