L’hypnose, une pratique à envisager dans le soin ?
L’hypnose est une discipline qui ne fait pas consensus dans le monde scientifique pour sa dimension magique, surnaturelle. Il est vrai que ce que nous connaissons de l’hypnose est corrélé aux spectacles de magie, au tour de passe-passe ou bien encore à la relaxation. Et pourtant, cette vision est complètement fausse. Alors, qu’est-ce que l’hypnose réellement ? Est-il possible d’utiliser cette pratique dans le soin ?
C’est un état de veille intense, le patient est conscient de ce qui se passe et de ce qui se dit. Il est dans un état de conscience modifiée, c’est un état d’hyper-sensorialité. Le but de l’hypnose est de mettre en lien le conscient et l’inconscient, afin de lâcher-prise. La conscience hypnotique est un état d’indifférence de l’extérieur. La personne perd son esprit critique et ses fonctions réflexes, lui permettant d’accéder à un « monde imaginaire ».
Notre état interne est influencé par nos pensées et nos émotions, les mots ont un impact sur notre cerveau, et à terme sur notre corps. L’hypnose veut donc mettre en lien nos émotions, nos pensées et notre fonctionnement corporel. Un mot entendu et compris par l’esprit, traité par le cerveau, agit sur le corps.
Au niveau du cérébral, la zone activée lorsque nous répétons mentalement et que nous pratiquons une activité est la même. L’hypnose utilise donc ce biais pour influencer notre fonctionnement interne. Grâce à des procédés linguistiques comme des suggestions verbales, des métaphores, des questionnements, il y a une baisse de la vigilance. La personne entre dans un processus hypnotique. Différentes zones du cerveau sont alors activées et notamment celle de l’attention (cortex cingulaire, pariétal et préfrontal). Des contenus alternatifs sont produits, ce qui permet de créer des nouveaux liens actifs entre différentes zones du cerveau (entre le réseau de l’attention focalisée et de la zone de l’hyper-contrôle) et ainsi favoriser la résolution de certains problèmes. Tout le long, la personne a conscience de ce qu’elle fait.
Alors quelle utilisation dans le soin ?
Dans le soin, les mots ont d’autant plus d’importance, car ils accompagnent un geste, une pratique réalisée sur une personne. Le professionnel peut utiliser une communication hypnotique en faisant appel à des techniques linguistiques et des techniques relationnelles. Cette méthode est basée sur l’importance des mots, si le patient prononce ou entend un mot lié à la douleur, il va activer la zone du cerveau de la douleur et de l’inconfort. Pour la pratique professionnelle, il est donc pertinent d’utiliser des mots simples à connotation positive, afin de ne pas impacter négativement l’état interne du patient.
En plus d’une communication plus adaptée, il existe différentes modalités de l’hypnose médicale : l’hypnose conversationnelle, l’hypnose formelle et l’auto-hypnose. Ces pratiques sont utilisées dans divers corps de métiers du soin.
L’hypnose conversationnelle est issue de l’hypnose ericksonienne. Pour cela, le praticien fait appel à des techniques de focalisation avec des suggestions indirectes, des images métaphoriques et des confusions de langage. C’est une conversation entre le thérapeute et le patient, il amène le patient à voir « son monde » différemment. On fait appel aux cinq sens, mais aussi aux trois types de langage : le langage verbal (les phrases et mots utilisés), le langage para-verbal (modulation de la voix) et le langage non verbal. Le patient est dans un état de conscience modifié, et le praticien veille à guider la conversation pour maintenir la personne dans ce monde imaginaire.
L’hypnose formelle est une transe induite par le praticien via l’utilisation de souvenirs agréables, choisis juste avant avec le patient. Ce dernier doit arriver à se dissocier de la réalité en se focalisant sur un son, une image liée au souvenir.
Enfin, il existe l’auto-hypnose. C’est la capacité du patient à retrouver la transe hypnotique grâce aux moyens d’ancrage donnés par le praticien au cours d’une séance d’hypnose, moyens décidés en accord avec le patient. Cela permet de rendre le patient acteur du soin.
L’hypnose peut être utilisée auprès des patients de tous les âges. Chez l’enfant, elle permet de travailler l’anxiété, le manque de confiance ou la peur des apprentissages. Il y a une période optimale à partir de 6-8 ans quand l’enfant est en âge d’apprendre et que son imaginaire est le plus foisonnant. Chez l’adulte, le thérapeute peut l’utiliser pour des douleurs chroniques, de la dépression ou bien encore des syndromes parkinsoniens.
L’hypnose n’est pas une thérapie, mais bien un outil thérapeutique, qui a toute sa place dans la pratique du soin en tant que méthode douce. Comme tout outil, il faut le maîtriser et pour cela, il faut se former. Il est donc primordial de dépasser les préjugés concernant l’hypnose pour rendre la pratique du soin optimale pour les patients.
Marine Jouin