Lebensborn, un programme méconnu


 

Erik Witsoe

Ligne de crédit : Unsplash


Dans l’un des projets d’Hitler, il fallait garder la supériorité de la race suprême aryenne. Diverses méthodes ont été employées comme l’extermination de minorités (communauté juive, communauté tzigane,…) les jeunesses hitlériennes, les expériences sur les personnes handicapées.

Hitler annonçait en 1933 : « La jeunesse allemande doit être rapide comme un lévrier, solide comme du cuir et dure comme de l’acier ». Un programme imaginé par des idéologues nazis a vu le jour dès 1935 : le Lebensborn. Le but était de faire perdurer la race supérieure par la procréation d’enfants de pure race aryenne. Pour cela, il fallait sélectionner des géniteurs et des génitrices correspondant aux critères aryens (grands, blonds, yeux bleus). 

Ce programme de pouponnières s’est étendu de 1935 à 1945 un peu partout dans les territoires occupés. On recense 10 pouponnières en 1940 en Allemagne, 9 en Norvège, considérée comme le berceau même de la race aryenne. Et, il en existait également un en France, dans l’Oise. Les chiffres sont accablants, on comptabilise environ 22 000 enfants nés sous ce programme.

La création des maternités était au cœur du projet du REICH car il fallait permettre aux mères d’accoucher dans de bonnes conditions et surtout d’éviter les avortements. Ce programme veillait à ce que les naissances ne soient pas déclarées à l’état civil, l’identité du père était cachée. Les enfants n’étaient pas considérés alors comme des êtres-humains mais comme des cadeaux à Hitler. Ils étaient confiés à des familles d’adoption qui les éduquaient selon la bonne instruction nazie. Ainsi, ils constitueraient l’Elite du IIIème Reich qui devait durer pour les fanatiques nazis jusque mille ans. 

Les géniteurs étaient pour la plupart des SS, considérés comme les élites de la race aryenne. Les mères étaient de divers horizons, des infirmières pour le Reich, des personnes du petit peuple, des étrangères. Toutes avaient un même point commun, elles devaient répondre aux critères nazis, elles devaient être les génitrices parfaites. Une pratique peu connue était de rigueur chez les nazis. Les membres du parti nazi devaient au moins avoir 4 enfants avec leur épouse légitime, et faire sur « ordre secret » des enfants hors mariages avec ces femmes. Pour certaines d’entre elles, elles croyaient à une histoire d’amour avec ces soldats allemands, qui cachaient leur véritable vie de famille. Une fois enceintes, elles étaient délaissées par les géniteurs et prises en charge pour les pouponnières.

Selon l’historien Fabrice Virgili, le projet de maternité en France était déjà d’actualité au printemps 1942. Cependant, les allemands « considéraient les français comme un peuple abâtardi, issu de sang mélangé et donc racialement sans intérêt ». Mais suite à l’occupation allemande, le nombre d’enfants nés de père allemand a explosé changeant ainsi la mentalité des nazis. Certaines femmes du Nord de la France étaient désormais vues comme de bonnes candidates répondant aux atteintes aryennes. Le choix de l’endroit d’une pouponnière française s’est porté sur le manoir de Bois-Larris, propriété de la famille Meunier (très connue pour ses chocolats) occupée depuis 1942. On y accueillait des femmes enceintes de SS ou de membres des services de police nazie. Les deux parents sont soumis à une sélection pour répondre aux critères raciaux aryens établis par le régime hitlérien. Dès la naissance, les enfants étaient enlevés à leur mère pour être éduqués selon la bonne éducation nazie, toute trace de leur géniteur était effacée. Dès la libération de Paris, les enfants et les mères volontaires étaient évacués dans les Lebensborn en Allemagne ou en Belgique. Les enfants ont navigué d’une maternité à l’autre. Les mères mais aussi les sages-femmes ont été abandonnés par le corps médical et les membres du parti nazi. La nourriture et les provisions ne venaient plus, tout l’effort de guerre était concentré sur la débâcle allemande. En 1948, un rapport a mis en évidence que 23 enfants seraient nés ou auraient transité dans cette pouponnière française.

La maison mère de ce programme était à Steinhöring en Bavière. Lors de la libération, les américains ont pu découvrir 300 jeunes enfants et quelques mères délaissées. Les dirigeants avaient pris la fuite en ayant brûlé les archives, toutes les informations sur les géniteurs des enfants étaient parties en fumée.

Ce programme eugénique a eu un impact sur le développement de ces enfants. Ils avaient à la fois le statut de victimes des projets fous nazis tout en étant considérés comme complices et coupables par le passé de leurs géniteurs. La plupart ont été rapatriés en Allemagne, et certains sont revenus en France. Par l’absence de certificat de naissance, certains enfants ont été envoyés loin de leur pays d’origine. Une partie d’entre eux ont été rendus à leur mère, d’autres adoptés ou confiés à l’assistance publique. Pour beaucoup, ce passé a été caché mais ceux qui ont été en quête de leur véritable identité se sont retrouvés face à des murs de silence.

Aujourd’hui, l’eugénisme est un danger de notre société notamment par les avancées sur la génétique. Ce programme nazi infâme et l’impact psychologique sur les enfants nés dans les pouponnières doivent nous amener à réfléchir sur les conséquences de cette pratique.

Marine