La voix est-elle le reflet de l’âme ?


 

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Que voulait dire Platon au travers de sa célèbre phrase « La voix est le reflet de l’âme » ? Nous voyons notre voix comme un outil de communication. Ce ne serait qu’un son qui vibre, émis par les cordes vocales. Or, la production de la voix est beaucoup plus complexe, et montre une part de notre personnalité. Nos émotions, nos sentiments sont perceptibles au ton employé dans notre voix.

Bien connaître sa voix, c’est connaître sa voie. Prendre conscience des mécanismes qui construisent notre voix, c’est prendre conscience du fonctionnement de son corps. C’est ressentir les vibrations, positionner sa respiration et prendre conscience de son potentiel vocal. La voix est un atout social, puisque c’est la première chose qu’on entend au téléphone. Elle nous définit, il faut donc se sentir à l’aise avec notre voix pour pouvoir communiquer avec les autres.

Ce versant social de la voix se traduit notamment dans la vision du genre. Nous reconnaissons une voix plutôt féminine, avec des intonations particulières, une articulation plus prononcée. La voix masculine, quant à elle, a plus de résonance et une intonation grave. La voix définit la personne. Elle varie en fonction de diverses caractéristiques biologiques mais aussi émotionnels, culturels ou environnementaux. Quand nous communiquons avec une personne, nous reconnaissons grâce à de nombreux critères le genre de la personne, comme la hauteur, le timbre ou encore certains critères sociaux (les mimiques du visage, l’articulation). Pour être en accord avec soi-même, il faut être en accord avec sa voix. C’est ainsi que de nombreuses personnes transgenres passent par la rééducation vocale pour accompagner leur transition.

Depuis le 8 février 2010, la dysphorie de genre (connue avant sous le nom de transsexualisme) n’est plus considérée comme une affection psychiatrique. Jusqu’alors, le terme employé était « transsexualité », cependant cela avait une connotation psychiatrique, puisque la transsexualité était alors considérée comme une pathologie des troubles psychosexuels. Aujourd’hui, il faut préférer l’utilisation des termes « transidentité » ou « transgenre » pour désigner une personne dont l’identité n’est pas en corrélation avec celui qui lui a été assigné à la naissance.

Désormais, la dysphorie de genre est considérée comme une affection de longue durée « hors liste ». Ainsi, les personnes transgenres peuvent bénéficier de soins remboursés pour les accompagner dans leur transition comme l’hormothérapie, la chirurgie ou encore l’orthophonie. Commence alors un long parcours pour que les personnes arrivent pleinement à vivre avec leur genre. Il y a différentes transitions, mais chaque personne effectue les démarches qui lui sont nécessaires à ses besoins. La transition sociale correspond au fait de modifier son prénom, ses pronoms et les accords. Elle peut être accompagnée de la transition administrative (ou légale) avec le changement juridique du prénom et de sa mention de genre sur les documents. La transition physique, quant à elle, est le changement du style vestimentaire ou encore d’une coupe de cheveux. Enfin, la personne peut modifier son corps afin de se sentir mieux avec cette enveloppe corporelle. C’est la transition médicale. Différents moyens sont utilisés comme le traitement hormonal ou bien encore l’intervention chirurgicale.

Certaines personnes ne transitionnent pas, car elles n’en ressentent pas le besoin. Elles ne s’identifient juste pas au genre assigné à la naissance, elles n’ont pas envie de passer par une transidentité. Cependant, la pression sociale pousse certaines personnes à transitionner par dysphorie sociale, pour répondre à des critères du genre et à la perception sociale genrée que les autres ont d’elles-mêmes. La voix, fortement liée à l’expression du genre, est donc travailler afin d’être mieux perçu comme une personne cisgenre. La rééducation vocale auprès d’un orthophoniste accompagne les personnes dans leur transition. Ainsi, les patients apprennent à connaître leur voix, pour la moduler et lui donner le ton qu’il leur convient. En trouvant leur voix, ils sont plus à l’aise avec eux-mêmes.

Alors, si pour Platon, la voix est le reflet de l’âme, je dirai que la voix est plus que ça. C’est un outil, c’est un support, c’est une meilleure connaissance de soi-même. Il faut juste apprendre à la connaître, et à prendre soin. Les masques, les environnements bruyants ou professionnels mettent à mal la voix. Or, elle joue un rôle primordial dans l’acceptation de soi, et dans notre rapport aux autres. Prenez donc soin de votre voix.

Marine Jouin