“Je t’aime est sans ailleurs”


 
The Brooch. Eva MudocciEdvard Munch, Norway, 1903. Ligne de crédit : John H. Wrenn Memorial Collection.

The Brooch. Eva Mudocci

Edvard Munch, Norway, 1903.

Ligne de crédit : John H. Wrenn Memorial Collection.


Toujours vacillant, ne se fixant jamais, devant sans cesse être renouvelé, l’amour est source de crainte pour nombre d’entre nous. M’aime-t-on encore ? Si oui, comment m’en assurer ?

M’en assurer ? Voilà une prétention démesurée, car, il faut tôt ou tard me rendre à l’évidence “le sujet amoureux n’a à sa disposition aucun système de signes sûrs” et c’est pour cela qu’il se questionne, que je me questionne… trop, que je me tourmente… à l’excès.

Et pourtant, tel un mirage, la trace d’un signe apparaît, un semblant de preuve. Cet espoir, cet acte salvateur, tout détenu en ces mots “Je t’aime”.

“Je t’aime est sans ailleurs”, comme la goutte qui tombe, troublant la surface de l’eau, voilà que son effet se dissipe aussitôt. L’impact n’aura été que de courte durée, remède de passage à la crainte du quotidien, revoilà l’obscurité qui enserre.

“Je t’aime est sans ailleurs”, il ne vaut que dans l’instant, à ce moment où on l’entend. L’orgueil à son apogée, ça y est ! Je suis aimé, je le sais, c’est assuré, et pourtant …

Véritable foie prométhéen que ce doute pernicieux qui sans cesse revient.

Comment pourrait-il en être autrement ? Je t’aime est sans ailleurs, Je t’aime est sans nuance, “il supprime les explications, les aménagements, les degrés, les scrupules”.

Il y a de la violence dans ces mots, doublée d’une insouciance folle, Je t’aime ne mesure pas sa force, il émerge, défie et s’échoue. Reviendra-t-il ? Reverrai-je cette éclipse dont le cycle instable n’est prévu par nul astronome ?

Après tout, Je t’aime a-t-il une quelconque valeur ? Peut-être me suis je fié à un spectre ?

Retour à l’origine, me voici condamné, à nouveau, naviguant dans le questionnement perpétuel et invincible.

Tout était dans “le jeté” et pourtant … mes doutes n’ont qu’augmenté une fois ces paroles passées.

Emilien Pigeard

 


Bibliographie :

Roland Barthes, Fragments d’un discours amoureux


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Dimanche 1er novembre 2020