Vers un nouveau paradigme économique ? (3/4)

– Vers le progrès, par l'émancipation –


 
Clay BanksLigne de crédit : Unsplash

Clay Banks

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De la machinerie comme émancipation du prolétariat et accès au savoir.

 

« De nos jours, toute chose paraît grosse de son contraire. La machine possède le merveilleux pouvoir d'abréger le travail et de le rendre plus productif : nous la voyons qui affame et surmène les travailleurs. » Telle est la considération que l'on peut trouver dans le fameux Capital de Marx. De même, chez Piketty, dans Le Capital au XXIème siècle, nous trouvons une considération semblable : « A quoi sert le développement de l'industrie, à quoi servent toutes ces innovations techniques, tout ce labeur, tous ces exodes, si au bout d'un demi-siècle de croissance industrielle la situation des masses est toujours aussi misérable ? ». Ainsi Marx et Piketty semblent avoir conscience du pouvoir émancipateur que devrait avoir à jouer la machine dans l'ensemble de la société et de la restriction mise en place par la bourgeoisie pour maintenir les classes prolétaires sous leur égide. Mais quelle place devrait occuper la machine dans une économie symbiotique se voulant être saine tout autant économiquement, écologiquement, politiquement et socialement ? En effet, si les décennies ont passés depuis Marx, les troubles musculo-squelettiques sont depuis vingt ans la première maladie professionnelle en France. La répétition, source d'aliénation des travailleurs et de leur maux physiques ne devrait prendre place dans une civilisation symbiotique, et c'est exactement l'exemple que nous dévoile Adrian Bowyer et son projet d'imprimante 3D RepRap. Le principe étant de fabriquer une machine auto-réplicable et de la distribuer à bas coût en faisant d'elle une technologie de pointe permettant de libérer les moyens de production, tout en maintenant une visée très nettement politique : « La machine à prototypage rapide réplicable va permettre l'appropriation révolutionnaire des moyens de production par le prolétariat. Mais elle va le faire sans les dangereux et défaillants aspects de la révolution, et même sans ceux de l'industrie. J'ai donc décidé d'appeler ce processus marxisme darwinien... ». Ainsi, la machine pourrait enfin libérer l'homme au lieu de le contraindre, le laissant ainsi disponible à l'acquisition d'informations. Rappelons que l'économie symbiotique a pour point clé l'information, gratuite, partagée et illimitée. Ce faisant, imaginons la libération du prolétariat dans l'accès au savoir, aux idées et de fait au partage de l'information : la multiplication de l'information serait telle qu'elle en deviendrait probablement source d'une économie purement symbiotique, usant d'égalité pour le bien commun.

 

De la fin de l'extraction par la transformation.

 

De nos jours, plus de 86% de l'énergie consommée proviendrait de ressources d'extractions massives tels que le charbon, le pétrole, le gaz ou encore l'uranium. Là n'est pas pensée nouvelle: nous avons à nous détourner des sociétés extractives du passé, à prendre conscience que l'homme ne peut continuer à agir en tant que fossoyeur, sans quoi il sera lui-même amené vers sa tombe. Toutefois, dans le cadre d'une économie symbiotique, la fin de l'extraction, ou du moins sa forte diminution semble possible. En effet, un nouveau paradigme, de type régénératif devrait savoir maintenir l'équilibre écologique planétaire. Rappelons nous que l'information prime sur la matière, car celle-ci se multiplie indéfiniment lorsque la matière ne peut que se diviser. Toutefois, l'exercice de l'information sur la matière permet la modulation de cette dernière. Ainsi, les ressources abondamment extraites dans le passé doivent être réemployées. La matière brut n'a pas besoin d'être sans cesse nouvellement extraite, d'où la nécessité du recyclage, de la transformation de la matière par l'information. A long terme, les biens devront être modulables et interopérables. En effet, nul besoin de remplacer la totalité d'un appareil quelconque en le jetant. L'appareil doit est divisible. Les parties des objets qui s'usent les plus rapidement peuvent (et d'une certaine manière doivent) être remplacées indépendamment des autres composants. De plus, dans la volonté d'une amélioration de son appareil, il n'est pas nécessaire de tout changer. C'est par exemple le principe du smartphone modulaire : en cas de panne d'une pièce, il vous suffit d'en changer aisément cette même pièce ; en cas d'attentes plus élevées concernant son appareil photo par exemple, il vous suffit d'en changer l'appareil photo. Ainsi, plus les objets sont simples, plus il est simple de les réparer ou de les améliorer à sa guise. La transition économique vers le symbiotique donnerait l'avantage de la disponibilité d'une grande partie de métaux déjà extraits. « Jeter » deviendrait alors automatiquement « recycler » et les transactions et échanges économiques se baseront alors sur la seule valeur ajoutée et non sur la matière en tant que telle, ou du moins dans une considération minime.

Yoann STIMPFLING